Retour sur le Congrès ECE 2021 : Pathologies hypophysaires, deux confirmations et quelques nouvelles perspectives thérapeutiques

Auteur : Dr Benjamin Chevalier, Service d'Endocrinologie, Diabétologie, Maladies Métaboliques CHU de Lille

Les données sur l’osilodrostat et la metyrapone dans le traitement des adénomes corticotropes ont été actualisées. Des résultats précliniques suggèrent de nouvelles cibles thérapeutiques potentielles. Enfin la problématique de la grossesse après craniopharygiome reste très délicate.

Le Pr Gadelha de Rio de Janeiro a présenté les résultats de l’essai clinique LINC4, étudiant l’efficacité de l’Osilodrostat dans la maladie de Cushing. La chirurgie reste le traitement de première intention de la maladie de Cushing, mais n’est pas systématiquement réalisable et expose à des récurrences au cours du suivi pouvant nécessiter l’introduction d’un traitement médical1. L’osilodrostat a une action surrénalienne en bloquant l’enzyme 11ß hydroxylase et inhibe la synthèse de cortisol. L’étude LINC4 était un essai de phase 3, visant à évaluer l’efficacité de l’osilodrostat dans la maladie de Cushing. Les patients ont été traités par l’osilodrostat ou un placebo pendant 12 semaines. 77% des patients sous osilodrostat ont normalisé leur taux de cortisol dans les urines (CLU) contre 8% sous placebo. Ceci était associé à une amélioration des valeurs de tension artérielle, poids, moral et qualité de vie. Les effets secondaires étaient similaires à ceux observés précédemment : arthralgies, diminution de l'appétit, fatigue et nausées. Cette molécule représente donc un moyen efficace et bien toléré dans le but de contrôler l’hypercortisolisme associé à la maladie de Cushing sans possibilité de geste chirurgical.


La metyrapone est également un inhibiteur de la stéroidogénèse surrénalienne bloquant la 11ß hydroxylase. Son efficacité a déjà été rapporté dans l’essai PROMPT : il avait alors été testé dans l’ensemble des causes d’hypercortisolisme2. Le Pr Nieman du NIH aux États-Unis, a rapporté les résultats de la phase d’extension après 48 semaines de traitement. Dans cette phase de l’essai, n’étaient incluent que les patients présentant un cortisol libre urinaire normal ou inférieur à 2 fois la limite supérieure de la normale (LSN) après 12 semaines de traitement par metyrapone, ce qui correspondait à 42 des 49 patients de l’étude. 88% présentait une maladie de Cushing. Le cortisol libre urinaire médian au début de cette 2ème phase était de 0,96LSN. A 36 semaines, le cortisol libre urinaire médian était de 1,04 LSN : normalisé chez 17 patients. Le bénéfice clinique jugé sur les symptômes physiques ainsi que les paramètres métaboliques et cardiovasculaires s’est poursuivi. Le profil de tolérance est resté similaire à ceux observés précédemment. Au total, le cortisol libre urinaire était normal chez 49% des patients à 36 semaines, ce qui confirme l’intérêt de la metyrapone dans le traitement médical des hypercortisolismes.


Les analogues de la somatostatine sont généralement inefficaces dans la maladie de Cushing. Le Dr Ibanez-Costa, de l’université de Cordoba en Espagne, a présenté ses travaux cherchant à explorer le rôle du variant du récepteur à la somatostatine SST5TMD4 via des prélèvements tissulaires obtenus chez des patients : la majorité expriment le variant SST5TMD4, ceci est associé à une augmentation de la viabilité cellulaire et la non-réponse aux AS. Ce marqueur pourrait donc permettre la prédiction de la réponse à ce traitement chez les patients atteints de la maladie de Cushing.
Les intégrines sont des protéines assurant la médiation des interactions entres cellules ; plusieurs sont surexprimées dans les cancers. Le Dr Chen (Munich) a présenté une étude préclinique cherchant à étudier l'expression et la fonction des intégrines dans la maladie de Cushing : les gènes codant pour les sous-unités des intégrines αvβ1, αvβ5 et αvβ8 sont exprimés, et semblent réguler l'activité du promoteur de la POMC et la viabilité cellulaire. Des travaux complémentaires sont nécessaires afin d’évaluer l’intérêt du ciblage chez l’homme de ces protéines dans le contrôle de la taille lésionnelle et leur capacité de sécrétion.


Des antagonistes de la GHRH ont la capacité d’inhiber la croissance de multiples tumeurs et de réduire la production d’hormone de croissance (GH) dans des modèles animaux. Néanmoins leur intérêt dans les adénomes hypophysaires est peu étudié. Le Dr Gesmundo, de Turin, a étudié deux nouveaux antagonistes, MIA-602 et MIA-690. En utilisant des modèles de culture cellulaire, il a été mis en évidence que ces deux molécules ont une action anti tumorale potentielle dans les adénomes à prolactine à GH et les AC, ainsi que des propriétés anti sécrétoires, et font envisager des développements pharmacologiques chez l’homme.


Enfin le Dr Müller (Oldenburg, Allemagne) a présenté les résultats de KRANIOPHARYNGEOM 2000/2007, un travail observationnel étudiant la fertilité féminine chez les patientes prise en charge pour un craniopharyngiome dans l’enfance. Les résultats montrent que les grossesses sont rares, et n’ont pu être obtenu qu’avec des méthodes d’AMP chez les patientes présentant un hypopituitarisme3. Il est donc nécessaire de préparer les grossesses chez les patientes désireuses, qui doivent être prises en charge dans des centres experts.


Ressources :

  1. Pivonello, R., De Leo, M., Cozzolino, A. & Colao, A. The Treatment of Cushing's Disease. Endocrine Reviews 36, 385-486 (2015).
  2. Nieman, L. K. et al. Metyrapone Treatment in Endogenous Cushing's Syndrome: Results at Week 12 From PROMPT, a Prospective International Multicenter, Open-Label, Phase III/IV Study. Journal of the Endocrine Society 5, A515-A515 (2021).
  3. Sowithayasakul, P., Boekhoff, S., Bison, B. & Müller, H. L. Pregnancies after Childhood Craniopharyngioma: Results of KRANIOPHARYNGEOM 2000/2007 and Review of the Literature. Neuroendocrinology 111, 16-26 (2021).