Retour sur le Congrès ECE 2021 : Tumeurs surrénaliennes, quoi de neuf ?

Auteur : Dr Arnaud Jannin, Service d'Endocrinologie, Diabétologie et Pathologies Métaboliques CHU Lille

La découverte fortuite d'une masse surrénalienne, ou incidentalome, est une situation fréquente (5 % des examens d'imagerie chez l'adulte). Le clinicien doit alors définir d’une part si la lésion est bénigne ou maligne, et d’autre part si elle sécrète des hormones ou non. Les avancées de la biologie et de l’imagerie pourraient permettre de répondre plus facilement à ces questions.

Différencier une tumeur surrénalienne bénigne d’une lésion maligne est un véritable défi. Les examens d’imagerie actuellement disponibles sont peu sensibles et peu spécifiques. Le Dr Anju Sahdev, de l’Université Queen Mary de Londres, fait le point sur les récentes avancées. L’arrivée de nouvelles technologies comme le scanner spectral ou l’IRM avec analyses en diffusion et par spectroscopie pourrait permettre de mieux caractériser les lésions surrénaliennes. Actuellement, de nombreuses avancées biologiques ont également été effectuées avec les analyses métabolomiques qui permettent un dosage des stéroïdes urinaires surrénaliens par spectrométrie de masse couplée à la chromatographie, combiné à l'analyse de données utilisant une approche d'intelligence artificielle. Cette technologie, présentée par le Pr Wiebke Arlt de l’université de Birmingham, a récemment montré son intérêt afin de différencier les lésions malignes des lésions bénignes de la surrénale au cours de l’essai prospectif, européen, EURINE-ACT1. Cette étude a démontré qu’une nouvelle stratégie de triple test comprenant une détermination du diamètre de la tumeur, des caractéristiques morphologiques et métabolomique des stéroïdes urinaires permettrait de différencier les formes bégnines des formes malignes. Ce résultat est important car il pourrait permettre de diagnostiquer plus tôt et ainsi raccourcir le délai d'intervention chirurgicale pour les patients atteints de tumeurs malignes et également d’éviter une chirurgie inutile chez les patients atteints de tumeurs bénignes1.

Certaines lésions surrénaliennes sont associées à une sécrétion hormonale de glucocorticoïdes. Cette hypersécrétion augmente la graisse viscérale au détriment la masse musculaire favorisant l’insulino-résistance et la survenue d’un diabète, d’une dyslipidémie et d’une hypertension, éléments qui participent à augmenter le risque d’évènements cardiovasculaires (dont les infarctus du myocarde …) et ainsi le taux de mortalité de ces patients2–4. Ces études ont certes des limites du fait de leur caractère rétrospectif mais sont tout de même informatives et semblent indiquer qu’il est nécessaire de traiter ces patients et ceci d’autant plus lorsqu’ils présentent ces comorbidités (HTA, diabète, dyslipidémie, ostéoporose …). La question du type de traitement à réaliser (chirurgical ou médicamenteux) est encore en suspens. Le Pr Antoine Tabarin, de l’Université de Bordeaux, nous présente l’étude européenne CHIRACIC en cours. Cette étude contrôlée, randomisée, a pour but de comparer ces 2 types de traitements dans les tumeurs surrénaliennes cortisoliques infracliniques (hypersécrétion modérée de glucocorticoïdes). L’analyse métabolomique des stéroïdes urinaires pourrait également être une aide dans le choix du traitement à réaliser mais cela nécessite d’être confirmé5.

Enfin, dans les lésions sécrétant de l’aldostérone, la TEP (tomographie à émission de positons) au 11C-Metomidate pourrait être utile pour préciser le siège de la lésion6.

Références :

  1. Bancos, I. et al. Urine steroid metabolomics for the differential diagnosis of adrenal incidentalomas in the EURINE-ACT study: a prospective test validation study. The Lancet Diabetes & Endocrinology 8, 773–781 (2020).
  2. Morelli, V. et al. Cardiovascular events in patients with mild autonomous cortisol secretion: analysis with artificial neural networks. Eur J Endocrinol 177, 73–83 (2017).
  3. Di Dalmazi, G. et al. Progressively increased patterns of subclinical cortisol hypersecretion in adrenal incidentalomas differently predict major metabolic and cardiovascular outcomes: a large cross-sectional study. Eur J Endocrinol 166, 669–677 (2012).
  4. Lopez, D. et al. ‘Nonfunctional’ Adrenal Tumors and the Risk for Incident Diabetes and Cardiovascular Outcomes: A Cohort Study. Ann Intern Med 165, 533–542 (2016).
  5. Di Dalmazi, G. et al. The Steroid Profile of Adrenal Incidentalomas: Subtyping Subjects With High Cardiovascular Risk. The Journal of Clinical Endocrinology & Metabolism 104, 5519–5528 (2019).
  6. O’Shea, P. M. et al. 11 C-Metomidate PET/CT is a useful adjunct for lateralization of primary aldosteronism in routine clinical practice. Clin Endocrinol (Oxf) 90, 670–679 (2019).