Photo des boursiers FIRENDO lors du congrès ECE 2023, crédit : Jérôme Bertherat, Twitter

Retrospectives des boursiers FIRENDO du congrès ECE 2023 à Istanbul // Communications orales – Hypophyse et neuroendocrinologie - Highlights //

Auteur : Nesrine Benanteur

La session a démarré par une présentation de Cihan Atila, médecin et doctorant à l’université de Basel. Ce dernier a communiqué sur une étude menée sur le diagnostic du diabète insipide par stimulation à l’arginine ou à solution hypertonique saline. La perturbation de la partie postérieure de l’hypothalamus peut être à l’origine d’une carence en hormone antidiurétique (vasopressine) entrainant une polyurie, généralement compensée par une polydipsie. Le diagnostic différentiel principal attribué à un deficit en ADH est la polydipsie primaire, une pathologie caractérisée par une prise excessive de fluides qui combinée à cette carence, entraine une polyurie.

Le diagnostic différentiel entre ces deux conditions (deficit en ADH et polydipsie primaire) est essentiel, puisque qu’une potentielle erreur de diagnostic, et par conséquent, de la thérapie adoptée, peut entrainer des conséquences sévères chez le patient. Cette étude propose l’utilisation de la copeptine, tronçon C-terminal du précurseur de l’ADH, est un marqueur stable de la protéine, facile à quantifier, et pouvant améliorer la précision du diagnostic. De façon plus précise, l’équipe a démontré dans une étude de 2018 que le diagnostic du diabète insipide considérant la copeptine était pertinent : en effet la stimulation de la copeptine après un test d’infusion hypertonique saline permettait l’obtention d’une précision de diagnostic autour de 96%. Une surveillance accrue des niveaux sodiques est cependant nécessaire lors de ce test à cause des effets indésirables engendrés sur les patients. L’équipe a démontré dans une seconde étude en 2019 qu’un test plus simplifié était possible, notamment en induisant une stimulation de la copeptine, cette fois en utilisant l’arginine, donnant lieu à une précision de diagnostic proche des 93%.

Une étude diagnostique permettant de comparer les deux tests a été mise en place. Des patients souffrant du syndrome de polyurie/polydipsie ont été soumis aux deux tests. Le diagnostic final a été posé par deux comités indépendants d’endocrinologues, et basé sur l’histoire clinique des patients ainsi que sur leurs symptomes cliniques, leur réponse aux traitements, les clichés d’IRM, les résultats des biologies, les résultats des deux tests. 

Il semblerait que la production de copeptine stimulée par l’arginine est inférieure à celle induite par une solution hypertonique saline dans le diagnostic d’une carence en ADH, cependant, deux concentrations de copeptine ont été déterminées pour les deux tests, permettant le diagnostic optimal de la carence en ADH ou de la polydispie/polyurie primaire. Le test de stimulation à l’arginine peut donc être utilisé comme premier test, puisque plutôt bien toléré par les patients. Le test de stimulation hypertonique salin reste le test avec la meilleure précision de diagnostic, et devrait cependant être considérés dans des cas où le diagnostic serait controversé.


Dans la suite, Sophie Monnerat, médecin et doctorante à l’université de Basel a présenté les résultats préliminaires de l’étude TREASURE, concernant le syndrome de sécrétion inappropriées d’hormone anti-diurétique (SIADH).

L’ADH est libérée par la neurohypophyses lorsque l’osmolalité du plasma augmente et que le volume artériel effectif diminue, engendrant une réabsorption de l’eau au niveau rénal. Dans le cas du SIADH, la sécrétion d’ADH est augmentée malgré une absence de stimulation, ce qui engendre un excès de réabsorption de l’eau et une hyponatrémie. Les stratégies thérapeutiques sont multiples, partant de la restriction de la prise de fluides, vers l’augmentation de la clairance rénale de l’eau en utilisant des traitements médicamenteux (antagonistes des récepteurs à l’ADH, diurétiques, inhibiteurs SGLT2,…), et notamment la prise orale d’urée. L’hypothèse posée par l’étude TREASURE consiste en la prise de protéines par les patients atteints de SIADH, pour stimuler le processus de métabolisation par le foie de celles-ci en urée.

Pour cela, 17 patients présentant une SIADH chronique ont été supplémentés en protéines (90 g/jour) sur 7 jours, puis en urée (prise orale 30g/jour) sur 7 jours, et ce après phase de « wash-out » sans aucun traitement pendant 12 semaines.

En phase protéique, il semblerait que les niveaux de sodium du plasma aient en moyenne augmenté de 3mmol/L, et le même phénomène a été observé en phase de prise d’urée, et ce en gardant un niveau de prise de liquide plutôt constant durant les différentes phases de l’étude. Ce changement est quand même plus marqué en phase protéique. Les niveaux d’urée plasmatiques et urinaires suivent la même évolution, avec une augmentation de la concentration et ce dans les deux phases de traitement. On n’observe pas de corrélation entre l’évolution de la concentration de sodium plasmatique et les niveaux d’urée plasmatique, cependant, il subsiste une forte corrélation entre niveaux de sodium plasmatiques et urée urinaire confirmant la diurèse osmotique de l’urée comme mécanisme d’action.


La session s’est poursuivie avec une présentation de Federico Giachetti (Milan), traitant de la valeur pronostique et diagnostic de la mesure de l’hormone de croissance (GH) chez les nouveaux nés prématurés.

Le déficit en hormone de croissance constitue un défi majeur pour les endocrinologues parce que la prise en charge et diagnostic sont cruciaux afin d’éviter une hypoglycémie chez le nouveau-né.

L’augmentation physiologique de la concentration en GH dans les premiers jours après la naissance est utilisée pour explorer le déficit en hormone de croissance, et différentes concentrations ont été proposées aux cours du temps pour le diagnostic de cette condition. Il manque aujourd’hui cependant

Le but de cet étude consiste en la définition d’un range de référence pour les concentrations de GH chez les prématurés en utilisant des kits récents et ultra sensibles de mesure des concentration de GH, ceci dans le but de :

  • Donner une caractérisation précise des populations prématurés en relation avec les niveaux de GH à travers l’évaluation de prédicteurs liés à la grossesse, mais également intrinsèques aux  nouveaux nés.
  • Fournir une évaluation longitudinale des niveaux de GH chez les populations de prématurés.

La cohorte utilisée 78 prématurés, les concentrations de GH ont été mesurées sur des prélèvements sanguins réalisés 48h après la naissance. Cette étude a démontré pour la première fois que les prématurés présentent des taux de GH significativement plus bas que ceux retrouvés chez des nouveaux nés arrivés à terme.

Une corrélation positive entre les niveaux de GH et la durée de la grossesse a été observée, une corrélation négative entre les niveaux de GH et le risque d’avoir recours à la ventilation mécanique (invasive) a également pu être déterminée.


La session s’est ensuite poursuivie par une présentation de Fidéline Bonnet-Serrano (Paris) sur l’intérêt de l’utilisation des concentrations de cortisol sériques et salivaires dans le diagnostic du syndrôme de Cushing et dans le diagnostic différentiel des cas pseudo-Cushing. Sachant qu’aujourd’hui, le diagnostic du syndrome de Cushing repose sur l’UFC, la concentration sérique de cortisol après traitement à la dexaméthasone pour un test de suppression, ainsi que la mesure de la concentration en cortisol sérique ou salivaire au coucher, l’étude cherche à statuer sur le cortisol salivaire, et évaluer s’il peut remplacer la mesure du cortisol sérique, comprendre la valeur ajoutée des taux de cortisol cycliques versus une mesure unique de la concentration de cortisol par jour, et enfin évaluer si la mesure du cycle du cortisol peut aider dans le diagnostic différentiel du pseudo-Cushing et de la maladie de Cushing ACTH-dépendante. La cohorte de l’étude est composée de patients contrôle (pas de Cushing), de patients pseudo-Cushing (UFC ou cortisol sérique élevé), de patients Cushing ACTH-dépendants, et de patients Cushing surrénaliens. Les résultats ont démontré une forte corrélation entre cortisol sérique et salivaire, et ce à tout moment du cycle diurne. Il semblerait que la valeur diagnostique du cortisol salivaire dans le syndrome de Cushing soit aussi efficace que celle du cortisol sérique. Il semblerait également que ratio des taux maximum/minimum de cortisol sérique soit prédictif dans le diagnostic différentiel du pseudo-Cushing versus Cushing ACTH-dépendant.