Photo des boursiers FIRENDO lors du congrès ECE 2023, crédit : Jérôme Bertherat, Twitter

Retrospectives des boursiers FIRENDO du congrès ECE 2023 à Istanbul // Nouvelles recommandations sur la prise en charge d'un incidentalome surrénalien //

Auteur : Mélanie Mendes, melanie.mendes@aphp.fr

Un incidentalome surrénalien est défini par la découverte d’une lésion surrénalienne à l’occasion d’un examen d’imagerie réalisé hors contexte de pathologie surrénalienne connue.

Les dernières recommandations de l’ESE de 2016 ont été réactualisées en 2023 par un groupe d’experts en pathologie surrénalienne. Après la relecture de près de 4605 abstracts, les nouvelles recommandations ont pu être établies et s’articulent en 4 axes principaux.

1- Estimer le risque de malignité d’un incidentalome surrénalien Le scanner abdominal non injecté est l’examen à réaliser en première intention. Les critères de bénignité radiologiques sont définis par un aspect homogène et une densité spontanée inférieure à 10 UH. En présence de ces deux critères, il n’est pas nécessaire de réaliser un examen d’imagerie complémentaire, et ce quelle que soit la taille de la lésion. Lorsqu’un incidentalome homogène présente une densité spontanée entre 11 et 20 UH, la taille doit alors être prise en compte : s’il mesure moins de 4 cm, il est suggéré de réaliser une imagerie complémentaire. Le contrôle de l’imagerie à 1 an peut se discuter. Dans le cas d’un incidentalome hétérogène de plus de 4 cm avec une densité spontanée supérieure à 20 UH, il est suggéré de discuter de la prise en charge en RCP (réunion de concertation disciplinaire) et de considérer la chirurgie d’exérèse en première intention. Enfin, dans tous les autres cas intermédiaires (tumeur hétérogène de moins de 4 cm, ou tumeur homogène avec densité > 20 UH de moins de 4 cm, ou tumeur homogène de 11-20 UH et de plus de 4 cm), il est suggéré de discuter de la prise en charge en RCP et de réaliser en priorité des examens d’imagerie complémentaire. En cas de tumeur pouvant faire suspecter un corticosurrénalome, il est suggéré de doser les stéroïdes sexuels et les précurseurs de la stéroïdogenèse. Pour l’ensemble des tumeurs indéterminées, des critères tels que l’âge du patient, la taille lésionnelle, la latéralité, l’antécédent de néoplasie, la densité et le caractère sécrétoire devront être pris en compte La biopsie n’a pas d’indication, sauf dans le cadre d’un antécédent de cancer extra-surrénalien faisant alors suspecter une métastase surrénalienne.

2- Définir le caractère sécrétoire d’un incidentalome surrénalien Le terme « MACS : mild adrenal cortisol secretion » est la nouvelle terminologie remplaçant le syndrome de Cushing subclinique. Le diagnostic d’une MACS repose sur l’absence de freinage du cortisol après test de freinage minute au dectancyl (test à répéter plusieurs fois), une sécrétion cortisolique indépendante de l’ACTH, et un examen clinique permettant d’exclure un syndrome de Cushing avéré. D’autres tests hormonaux complémentaires pourront aider au diagnostic (cortisol libre urinaire, cortisol salivaire). Le diagnostic de MACS est exclu lorsque le cortisol après test de freinage minute est inférieur à 50 nmol/l. Il est recommandé d’exclure le diagnostic de phéochromocytome devant toute lésion n’ayant pas les caractéristiques radiologiques d’une tumeur bénigne (homogène et < 10 UH) par le dosage des métanéphrines plasmatiques ou urinaires. Le dosage de la rénine et de l’aldostérone est recommandé pour rechercher un hyperaldostéronisme primaire s’il existe une hypertension artérielle associée à une hypokaliémie. Enfin, il est recommandé de ne pas réitérer les dosages hormonaux si ceux-ci sont normaux au diagnostic, sauf apparition de signes cliniques évocateurs ou aggravation de comorbidités (diabète, HTA).

3- Cibler les patients nécessitant une prise en charge chirurgicale La prise en charge chirurgicale doit être réalisée par un chirurgien expert et entraîné. L’indication chirurgicale doit se discuter en RCP. Lorsqu’un patient présente un incidentalome unilatéral, asymptomatique, non fonctionnel, avec les critères de bénignité radiologique, il est recommandé de ne pas opérer. Lorsqu’une masse surrénalienne est suspecte de malignité, une invasion locale doit être recherchée sur l’imagerie afin d’orienter la technique chirurgicale. En cas de suspicion d’invasion locale, une surrénalectomie par laparotomie devrait être proposée. En cas de tumeur sans invasion locale radiologique et mesurant moins de 6 cm, une surrénalectomie minimale invasive est préconisée. Si la tumeur mesure plus de 6 cm mais sans invasion locale, l’approche chirurgicale devrait être individualisée. Dans le cadre d’une MACS, la prise en charge chirurgicale peut se discuter en cas de tumeur unilatérale chez un patient ayant des comorbidités (diabète, HTA, dyslipidémie, fractures vertébrales). La chirurgie devra être le moins invasive possible, et encadrée d’une corticothérapie péri-opératoire à la posologie de stress chirurgical. Un suivi endocrinologique devrait être poursuivi jusqu’à récupération de l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien.

4- Définir les modalités de suivi de patients non opérés avec incidentalome surrénalien

Plusieurs situations sont à différencier :

  • Dans le cadre d’un incidentalome avec critères de bénignité radiologique, il est recommandé de ne pas recontrôler l’imagerie, et ce quelle que soit sa taille.
  • Dans le cadre d’une masse surrénalienne indéterminée, il est suggéré de recontrôler l’imagerie après 6 à 12 mois afin d’exclure une évolutivité morphologique, par scanner non injecté ou par IRM.
  • Dans le cadre d’une MACS, il est recommandé un suivi annuel par un endocrinologue pour la réévaluation des complications engendrées par un excès de cortisol, mais la répétition de l’imagerie n’est pas indiquée.

Enfin, certaines précisions ont été apportées concernant des présentations particulières. Lors de la découverte d’incidentalomes bilatéraux, la démarche diagnostique est la même que pour un incidentalome unilatéral. En l’absence de MACS, le dosage de la 17OHP est recommandé pour exclure le diagnostic d’hyperplasie congénitale des surrénales.