Photo des boursiers FIRENDO lors du congrès ENDO 2023, crédit : Jérôme Bertherat, Twitter

Retrospectives des boursiers FIRENDO du congrès ENDO 2023 à Chicago // Hyperaldostéronisme primaire, phéochromocytomes, l’hypogonadisme //

Auteur : Antoine-Guy Lopez, Normandie Université, Inserm U1239 / Service d’Endocrinologie, CHU de Rouen, Antoine-Guy.Lopez@chu-rouen.fr

Le congrès de l’ENDO 2023 a eu lieu cette année à Chicago, 3ème ville des Etats-Unis, capitale de l’architecture moderne (ville de naissance des gratte-ciel). Il est bien entendu impossible de restituer l’ensemble des échanges, mais nous vous proposons au travers de ce résumé, un aperçu de trois conférences de cette édition 2023.


Les mutations somatiques du gène transporteur de zinc (ZNT1) sont responsables d’ hyperaldostéronisme primaire
Zinc Transporter Somatic Gene Mutations Cause Primary Aldosteronism 


L'hyperaldostéronisme primaire (HAP) est la forme la plus courante d'hypertension endocrinienne et se caractérise par une production autonome d'aldostérone. Au cours de ces dernières années de nombreuses mutations somatiques responsables de la production excessive d'aldostérone ont été identifiées (KCNJ5, ATP1A1, ATP2B3, CACNA1D et CTNNB1). Ces mutations sont retrouvées dans près de 90% des adénomes producteurs d'aldostérone (APA). Grâce aux nouvelles techniques de séquençage de nouvelle génération, l’équipe de W. Rainey (University of Michigan, USA) a identifié des délétions récurrentes au niveau du gène SLC30A1 dans cinq APA (p.L51_A57del, n=3 ; p.L49_L55del, n=2). SLC30A1 code le transporteur ubiquitaire du zinc ZnT1 (transporteur de zinc 1). Les variants de SLC30A1 identifiés se trouvent à proximité du site de liaison du zinc (H43 et D47) dans le domaine transmembranaire II et sont responsables d’une anomalie de transport des ions. Les patients porteurs de cette mutation SLC30A1 sont préférentiellement des hommes de plus de 60 ans et présentent des concentrations élevées d'aldostérone et de 18-oxo-cortisol. Les études fonctionnelles ont révélé que ces mutations provoquent une entrée anormale de sodium entrainant une dépolarisation de la membrane cellulaire, et une augmentation de l’activité calcique intra cellulaire. Cette augmentation de l'activité du calcium cytosolique, stimule l'expression de CYP11B2 et la production d'aldostérone. La découverte d'une nouvelle classe de protéines (transporteur de zinc), responsable de l’HAP, apporte de nouvelles informations sur la physiopathologie des APA. 

Références bibliographiques : 

  • Rege, J. et al. Zinc transporter somatic gene mutations cause primary aldosteronism, in press.

Perles et mythes dans l’évaluation et la prise en charge des phéochromocytomes

Pearls and Myths in the Evaluation and Management of Pheochromocytomas


Les phéochromocytomes et paragangliomes (PPGL) sont des tumeurs neuroendocrines rares se développant aux dépens de la médullosurrénale et des ganglions sympathiques ou parasympathiques. Ces tumeurs sécrètent le plus souvent des catécholamines en excès (adrénaline, noradrénaline, dopamine), à l’origine d’une hypertension artérielle et de possibles complications cardiovasculaires aiguës dont certaines pouvant être mortelles (infarctus du myocarde, arythmies, accident vasculaires…). Le Pr K. Pacak (National Institutes of Health, Bethesda, USA) a évoqué à travers plusieurs cas cliniques les dernières nouveautés dans la prise en charge de ces tumeurs. Le diagnostic de PPGL fonctionnel repose sur la mise en évidence d’une augmentation de la sécrétion des catécholamines. Les dosages recommandés à visée diagnostique sont les produits de dégradation des catécholamines : les métanéphrines et normétanéphrines. Les dosages plasmatiques en spectrométrie de masse tendent peu à peu à supplémenter les dosages urinaires. En effet, ils semblent moins sujets aux interférences médicamenteuses et sont plus fiables notamment en cas d’insuffisance rénale. Une fois le diagnostic biologique établi, un bilan d’imagerie est nécessaire afin de localiser la tumeur primitive et de réaliser un bilan d’extension à la recherche de lésions secondaires associées. Ce bilan associe une imagerie conventionnelle (tomodensitométrie ou imagerie par résonnance magnétique) à une imagerie nucléaire. Au vu, de la multiplicité des traceurs proposés, les dernières recommandations internationales proposent de guider le choix au cas par cas, en fonction du phénotype et du génotype des patients. La tomographie par émission de positons à la 18 fluoro-dopa (TEP-18F-DOPA) est à privilégier en cas de phéochromocytomes sporadiques. En cas de lésions cervicales ou métastatiques, les imageries marquées au 68 Gallium comme le 68Ga-DOTATOC sont à proposer en 1ère intention. Enfin, les grands axes de prise en charge thérapeutique ont été rappelés. Les traitements antihypertenseurs recommandés en première intention en pré opératoires restent les alpha-bloquants à dose progressivement croissante (prazosine). En cas de tachycardie secondaire aux alpha-bloquants, des béta-bloquants cardio-sélectifs et les inhibiteurs calciques bradycardisant (verapamil) sont maintenant fortement recommandés. Les inhibiteurs de synthèse des catécholamines (metyrosine) sont à réserver aux formes métastatiques et/ou résistante au traitement de référence. Cette nouvelle classe de traitement très efficace, reste encore très couteuse.

Références bibliographiques : 

  • Jhawar, S. et al. New Insights on the Genetics of Pheochromocytoma and Paraganglioma and Its Clinical Implications. Cancers (Basel) 14, 594 (2022).

Prise en charge de l’hypogonadisme fonctionnel chez l’homme

Management of Functionnal Hypogonadism in men


L’hypogonadisme masculin est défini comme l’incapacité du testicule à produire de la testostérone (T) à des niveaux suffisants. L’hypogonadisme fonctionnel est relativement fréquent (~12% des patients aux Etats-Unis) et doit être évoqué après avoir exclu toutes causes organiques (pathologies de l’axe hypothalamo-hypophysaire). L'hypogonadisme fonctionnel est souvent réversible et peut être lié à des facteurs externes comme l'obésité, le syndrome métabolique, le syndrome d’apnée du sommeil ou encore la consommation d'opioïdes, de glucocorticoïdes ou de stéroïdes anabolisants. Le Dr M. Irwig (Beth Israel Deaconess Medical Center, Boston, USA) a partagé son expérience clinique en rappelant les dernières recommandations sur le sujet. Les symptômes de l'hypogonadisme fonctionnel sont peu spécifiques. L’asthénie et le syndrome dépressif sont très répandus et peuvent être secondaire à de nombreuses pathologies. Parmi les symptômes sexuels, la baisse de libido est un signe plus spécifique du déficit androgénique que la dysfonction érectile (souvent d’origine multifactorielle : vasculaire, neurologique, médicamenteuse…). Un deuxième obstacle dans la prise en charge de ces patients est le manque de compréhension des valeurs de référence. Les normes de dosages de la testostérone sont établies pour des hommes adultes en bonne santé âgé de 19 à 39 ans et non obèse. Or les hommes en surpoids et âgés ont des niveaux de testostérone totale plus faibles, ce qui s’explique en partie par des taux réduits en SHBG. Dans le cas de patients présentant des taux de testostérone partiellement bas, l’androgénothérapie systématique n’est pas justifiée compte tenu d’une efficacité contestable. Certaines données suggèrent même des effets délétères, sans mentionner les coûts associés au traitement à base de testostérone. Aux États-Unis et ailleurs, il existe un problème croissant de prescription inappropriée et non indiquée de testostérone, principalement par le biais de plateformes en ligne et de certaines cliniques spécialisées à but lucratif qui font la promotion de la santé masculine et des traitements anti-âge. La plupart des causes d'hypogonadisme fonctionnel sont réversibles en traitant la cause sous-jacente, lorsque cela est possible. Par exemple, la perte de poids chez un patient obèse peut augmenter les niveaux de testostérone endogène, tout comme l'arrêt de la prise d'opioïdes ou la prise en charge du syndrome d'apnée du sommeil.

Références bibliographiques : 

  • Corona, G. et al. European Academy of Andrology (EAA) guidelines on investigation, treatment and monitoring of functional hypogonadism in males: Endorsing organization: European Society of Endocrinology. Andrology 8, 970–987 (2020).